Abstract
Valère Novarina qui est connu pour son théâtre, ne l’est beaucoup moins pour son activité de peintre et de dessinateur. Cet article décrit et analyse une action réalisée en 1983, au cours de laquelle il a dessiné pendant 15 heures de suite les 2587 personnages du Drame de la vie. Par une technique d’égarement des sens consistant surtout en une rapidité outrée de la main, Novarina essayait d’atteindre un état d’« absence à soi » où le côté actif de l’auteur-créateur s’estompe afin que la matérialité de la plume et de l’encre, mais également de son corps de dessinateur, prennent forme sans qu’une main directrice n’intervienne. Ce dessaisissement systématique du moi permet d’ouvrir un espace d’entre-deux de l’écriture et de la mise en scène où les figures tracées sur le papier entrent en rapport avec l’écriture corporelle et gestuelle qu’effectuent les acteurs sur scène. Cette action visait notamment à élargir le champ sensuel, voire matériel, dans lequel la parole s’exerce.